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A propos de Libre-Pensée

Fernidand buisson

1904. Déclaration de principe du Congrès de la Libre-Pensée
par Ferdinand Buisson, mardi 27 janvier 2009, 11:13
 
Déclaration de principe

   présentée par M. Ferdinand Buisson, directeur honoraire de l'enseignement primaire, professeur à l'université de Paris, député de Paris, président de l'association nationale des Libres penseurs de France et votée à l'unanimité par le Congrès de Rome, le 22 septembre 1904.
 
Le Congrès international de la Libre pensée, réuni à Rome le 22 septembre 1904, désireux de prévenir tout malentendu en fixant dès l'abord le sens qu'il attache au mot “libre pensée”, et par là même la portée des revendications qu'il formulera, croit devoir faire précéder ses délibérations spéciales de la Déclaration de principe énoncée dans les trois résolutions ci-après :
 
I - Première résolution : définition de la Libre pensée en général

La Libre pensée n'est pas une doctrine, mais une méthode, c'est-à-dire une manière de conduire sa pensée - et, par suite, son action - dans tous les domaines de la vie individuelle et sociale.
Cette méthode se caractérise non par l'affirmation de certaines vérités particulières, mais par un engagement général de rechercher la vérité en quelque ordre que ce soit, uniquement par les ressources naturelles de l'esprit humain, par les seules lumières de la raison et de l'expérience.
La Libre pensée peut être envisagée soit théoriquement dans l'ordre intellectuel, soit pratiquement dans l'ordre social.
Dans l'un et dans l'autre cas, elle se détermine d'après les deux règles ci-dessous.
 
II- Deuxième résolution : Deux règles de la Libre pensée dans l'ordre théorique ou intellectuel.

1- Première règle : La Libre pensée ne pouvant reconnaître à une autorité quelconque le droit de s'opposer ou même de se superposer à la raison humaine, exige que ses adhérents aient expressément rejeté non seulement toute croyance imposée, mais toute autorité prétendant imposer des croyances (soit que cette autorité se fonde sur une révélation, sur des miracles, sur des traditions, sur l'infaillibilité d'un homme ou d'un livre, soit qu'elle commande de s'incliner devant des dogmes ou les principes a priori d'une religion ou d'une philosophie, devant la décision des pouvoirs publics ou le vote d'une majorité, soit qu'elle fasse appel à une forme quelconque de pression, exercée du dehors sur l'individu, pour le détourner de faire, sous sa responsabilité personnelle, l'usage normal de ses facultés).

2 - Deuxième règle : La Libre pensée ne pouvant se borner à cette manifestation négative à l'endroit de tout dogme et de tout credo, elle exige de ses adhérents un effort actif en vue de réaliser par les moyens humains l'idéal humain.
Elle se refuse d'ailleurs à donner de sa propre conception de cet idéal le caractère absolu et immuable que s'attribuent abusivement les religions, mais que ne comporte ni la science ni la conscience humaine, l'une et l'autre obligées de se mouvoir dans le relatif et soumises à la loi du progrès.
Loin de céder à la tentation de construire prématurément un système définitif, la Libre pensée propose à l'humanité, comme le veut la nature des choses, de poursuivre indéfiniment le vrai par la science, le bien par la morale, le beau par l'art. Et si à chaque moment de son développement, elle est prête à rendre compte du résultat actuel de ses recherches, elle est aussi toujours prête à le compléter et à le rectifier, en ajoutant aux découvertes d'hier les découvertes de demain.
 
III - Troisième résolution : Deux règles de la Libre pensée dans l'ordre pratique et social


1- Première règle : La Libre pensée ne pouvant se contenter d'opinions purement spéculatives qui n'intéresseraient que la pensée individuelle, il lui appartient de fournir une règle de vie, aussi bien aux individus qu'aux sociétés.
Appliquée aux sociétés, elle est la méthode qui consiste à vouloir soumettre aux lois de la raison l'organisation sociale elle-même.
Une société qui s'inspire de cette méthode a pour premier devoir d'enlever à tous ses services publics (administration, justice, instruction, assistance etc) tout caractère confessionnel, par où il faut entendre qu'elle doit les rendre non seulement neutres entre les diverses confessions religieuses, mais étrangers et réfractaires à toute influence religieuse, rigoureusement exclusifs de tout dogmatisme, implicite ou explicite.
La laïcité intégrale de l'État est la pure et simple application de la Libre pensée à la vie collective de la Société. Elle consiste à séparer les Églises de l'État, non pas sous la forme d'un partage d'attributions entre deux puissances traitant d'égale à égale, mais en garantissant aux opinions religieuses la même liberté qu'à toutes les opinions et en leur déniant tout droit d'intervention dans les affaires publiques.

2- Deuxième règle : La Libre pensée n'étant complète que quand elle entreprend de réaliser socialement l'idéal humain, elle doit tendre à l'institution d'un régime sous lequel pas un être humain ne pourra plus être sacrifié ou même négligé par la société, et par conséquent ne sera mis ou laissé par elle, directement ou indirectement, dans l'impossibilité pratique d'exercer tous ses droits d'homme et de remplir tous ses devoirs d'homme.
 
La Libre pensée est donc logiquement génératrice d'une science sociale, d'une morale sociale, d'une esthétique sociale, qui, se perfectionnant par le progrès même de la conscience publique, constitueront un régime de justice : la justice sociale n'est que la raison appliquée par l'humanité à son propre gouvernement.
 
En d'autres termes, la libre-pensée est laïque, démocratique et sociale, c'est-à-dire qu'elle rejette, au nom de la dignité de la personne humaine, ce triple joug : le pouvoir abusif de l'autorité en matière religieuse, du privilège en matière politique et du Capital en matière économique.
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